VOYAGE(S) & TRANSITION(S)
VOYAGE(S) & TRANSITION(S)
Voyage low tech
Voyager low-tech, c’est l’avenir !
Et si on abandonnait sa bagnole pour sauter dans une carriole ? Ah ! Vade retro modèle Amish !
Attendez une minute ! Et laissez-moi vous montrer que la low-tech (les technologies douces en Français), c’est bien plus du bricolage New-Age. C’est une démarche qui va révolutionner vos voyages.
Par Jacques Tiberi
Journaliste, rédacteur en chef du Low-Tech Journal, un mag papier écolo dédié aux technologies douces, qui a récemment publié un hors-série sur les Voyages sans pétrole ni électricité.
On définit souvent les objets low-tech, comme la marmite norvégienne ou le frigo du désert par trois adjectifs : “utile, durable, accessible”. C’est vrai ; mais la low-tech, c’est bien plus que cela ! Prenez la famille Poussin. Elle n’a probablement jamais entendu le mot low-tech. Et pourtant, elle pratique un cyclotourisme innovant, en associant le tandem de papa-maman à la carriole de Léane (8 ans) qui tracte la remorque de Chouky, un bichon-maltais. Un moyen de transport étonnant, mais surtout pratique, bien plus écolo qu’une voiture, et simple puisqu’ils l’ont fabriqué eux-mêmes. Mais il serait injuste de limiter ce “carvélo” à une simple alternative à la voiture. Car ça va bien plus loin : c’est une véritable transformation du concept même de “voyage en famille” que proposent les Poussin. Voilà la force de la low-tech.
Mais d’abord, pourquoi je dis LA low-tech plutôt que LES low-techs ?
Parce que c’est une démarche personnelle et collective, une philosophie, je dirais même un mode de vie. Tout commence par un recentrage de ses besoins sur l'essentiel, aussi bien en matière d’hygiène, d'alimentation, de confort thermique, de mobilité, de numérique, etc. “Ai-je vraiment besoin de prendre une douche tous les jours, d’un smartphone, de manger des animaux morts, de racheter un nouveau jean dès qu’il se déchire... ?”
Une fois qu’on a distingué l’essentiel du superflu, on peut commencer à imaginer des façons sobres (en énergie et en matières premières) de répondre aux besoins essentiels. Pas facile de concevoir des outils et des méthodes simples à utiliser et à entretenir, dans un monde obsédé par le “toujours plus” et l’obsolescence programmée. C’est là que le DIY (faire soi-même) trouve sa limite et que l’on se tourne vers des communautés de co-construction, des recycleries, des tiers lieux, des artisans locaux ou un FabLab... Et le superflu, alors ? Bah ça devient du luxe. Souvent inutile. Mieux vaut s’habiter à s’en passer, avant qu’il ne disparaisse ! La rupture sera moins dure.
Voyager low-tech ?
Cette définition devrait conduire un ou une passionné(e) de voyages à tirer un trait sur les destinations lointaines accessibles en avion, pour se concentrer sur des lieux accessibles à pied, à vélo, en auto-stop, en train, en bateau à voile ou les cinq à la fois. Ça laisse quand même de la marge pour partir à la découverte de l’autre.
Alors, c’est vrai : ça oblige à réapprendre à voyager. Et même à redéfinir le sens du voyage. Où est l’essentiel ? dans la destination ? Ou dans l’expérience, le “tour”, la promenade, le sentier de grande randonnée, l’euro-véloroute, la colline tout là-bas, l’effort, le kiff, le couchsurfing, le gîte, le bivouac... et les rencontres. L’aventure humaine quoi ! Prendre un billet d’avion et acheter un guide de voyage... C’est has been ! Voyager, c’est se creuser la tête pour imaginer une aventure bas carbone, accessible à tou.te.s, ludique et pimentée !
Je vous ai fait peur ? Laissez-moi vous rassurer : low-tech ne veut pas dire « no-tech ». Il ne s’agit pas de rejeter la technologie, mais de la remettre au service des humains et du vivant. On peut donc être low-tech et utiliser un smartphone (ouf !), un train de nuit, une imprimante 3D (waw), voire mélanger des technologies anciennes et nouvelles !
L’esprit low-tech, c’est juste d’avoir assez de tech pour répondre à son besoin, sans que cela provoque une trop grande nuisance écologique ou sociale. En deux mots : c’est du discernement technologique. Une volonté de réintroduire des limites à la tech, parce qu’elle consomme toujours plus d’énergie – et souvent “d’énergie grise”, c’est-à-dire non comptabilisée et invisible pour le consommateur. “Euh Michel, c’est obligatoire de faire une visio ? On n'est que deux pour cette réunion. On peut pas juste se passer un coup de fil ?”
Révolution douce en cours
Vous l’avez compris : on entre dans une recherche systématique de frugalité, dans tous les domaines. En low-tech, on préfèrera donc un chauffe-eau solaire thermique à un panneau solaire, un four solaire (ou un poêle-rocket à bois) à un four électrique, des briques de chanvre aux parpaings, une laverie collective plutôt qu’un lave-linge par appartement, ou un vélo vintage remis à neuf dans un atelier du coin plutôt qu’un vélo électrique tout neuf made in china. Entrer dans une démarche low-tech peut donc révolutionner la vie d’une famille, mais aussi d’un immeuble ou d’un quartier/village. On commence par réduire sa consommation, faire des économies, soutenir le commerce local. Puis, on rejoint une asso, une communauté de makerz, avec lesquels on va réparer son petit électro-ménager, repriser des fringues, co-constuire des éoliennes ou des murs en terre crue.
Un collectif qui pourrait devenir un réseau d’amitié et d’entraide, avec lequel on échange des services et des outils. Peu à peu,
l’argent prend moins de place dans votre vie. Peu à peu, on entre en résilience. Et, un jour, on se retrouve à planifier un road trip collectif à vélo ou à pied accompagné d’un âne, une remontée de la Seine en Canoë, un tour de la Corse en pédalo, une traversée de la France en Rosalie, un aller-retour Nantes-Paris en char à voile...
C’est ainsi que la low-tech réenchante le voyage, fait sortir des écrans et du consumérisme, rompt avec les imaginaires techni-cool, aide à retrouver les autres, à rebâtir une solidarité et à refaire société.
Lowtech JOURNAL
Le magazine des technologies douces et des modes de vie résilients.
Un magazine créatif, militant et frugal, pour partager l'essentiel, renoncer au superflu et lier l'utile à l'agréable.
Tous les 2 mois, 32 pages pour découvrir des initiatives locales sincèrement écolo et vivre l’écologie au quotidien ! Notre objectif : Vous occuper l’esprit et les mains, sans prise de chou, ni greenwashing !