VOYAGE(S) & TRANSITION(S)
VOYAGE EN SERENDIPITÉ, TOUT CE QUE VOUS NE CHERCHIEZ PAS
De la startup nation au rêve post-capitaliste : mon voyage vers un monde en transformation
Voyage vers un monde en transformation et changement de vie
Cette histoire vraie romancée raconte comment l'auteur a réalisé une transition en partant d'un rêve de startup nation à un rêve post-capitaliste.
Vivez la transformation d'un entrepreneur en quête de sens social et environnemental
Par Jean-Philippe de Ozé
En racontant ce voyage aujourd’hui, douze ans après le début, et avec ma vision actuelle du monde, il est fort probable que le récit que vous allez lire prenne un peu de distance avec la réalité des faits. Cette plongée rétrospective a forcément, pour une partie au moins, les traits d’un conte dans le monde imaginaire de son auteur. Les choix que j’ai opéré sont malgré moi romancés pour leur donner du sens et une consistance en rapport avec le chemin parcouru et la place que j’occupe actuellement. Ainsi évoluent nos souvenirs avec le temps.
Entre quête de liberté et d’argent facile
Découverte du monde des startups
Dès la fin de mes études à HEC en 2010, je me suis lancé dans l’entrepreneuriat. Avec une dette de 60 000 euros contractée pour payer les frais de l’école, la sagesse aurait dû me faire opter pour une carrière en conseil ou en banque. Mais après une tentative rapide dans le monde du private equity, je n’ai pas pu m’y résoudre. Le modèle hiérarchique très rigide de ces entreprises ne me convenait tout simplement pas. L’entrepreneuriat, et notamment l’essor des startups de la tech était bien plus attirant. C’étaient les débuts de Facebook, de l’iPhone, et de YouTube. Un secteur où le jean remplaçait le costume cravate. Cette voie offrait l’opportunité aux jeunes diplômés d’avoir de vraies responsabilités, tout de suite. On avait l’impression de pouvoir changer radicalement le fonctionnement d’un marché : de le disrupter comme on dit dans le milieu. On se sentait valorisé dans cet univers que les plus âgés peinaient à saisir.
Secteur de la tech et argent rapide
Comme au casino, c’était aussi l’opportunité de gagner très vite beaucoup d’argent en revendant sa startup au bout de quelques années (et parfois juste de quelques mois). Pour moi, c’était une option bien plus alléchante que celle d’aller jouer le larbin dans une banque d’investissement ou un cabinet de conseil pendant plusieurs années en attendant une position de senior, théoriquement plus agréable. Les levées de fonds, les valorisations et les montants dépensés pour le rachat de startup au début de cette décennie étaient délirants ! Facebook a dépensé 22 milliards de dollars pour acheter l’application WhatsApp en 2014. La même année, l’application Yo, qui ne sert qu’à s’envoyer le message « yo » entre utilisateurs, levait 1,5 millions de dollars et était valorisée 10 millions de dollars… Je rêvais d’être l’un de ces heureux élus.
Désillusions financières
J’ai participé au succès de plusieurs startups du secteur de la publicité en ligne et du e-commerce en France et à l’étranger en tant qu’associé minoritaire. Ces expériences se sont finies par des désillusions financières où je n’ai pas vu la couleur des actions qui m’étaient promises : soit parce que j’avais eu la naïveté de faire confiance à la parole accordée par les associés majoritaires, soit parce que le contrat trop alambiqué que j’avais signé était truffé de clauses qui m’écartaient du banc des bénéficiaires. Fort de ces expériences, je me suis lancé à mon compte avec des proches en qui j’avais une réelle confiance. Toujours sur ce même marché de la publicité en ligne - ou ad tech pour les intimes. Les débuts de l’aventure étaient grisants ! On travaillait énormément mais les résultats étaient là. De nouveaux clients satisfaits, des revenus en croissance, une équipe qui grossit, un investisseur confiant : le rêve de la startup.
La fin du rêve
Premières difficultés
Et puis l’histoire a pris un tournant différent de mes expériences précédentes. Alors que je m’étais habitué à des levées de fonds mirobolantes et une croissance exponentielle des revenus au bout de quelques mois d’activité, nous avons rencontré des difficultés à devenir ne serait-ce que rentable. Cette fois, la chance n’était pas au rendez-vous et il nous fallait lutter contre vents et marées. Les cinq premières années, nous avons pivoté une bonne vingtaine de fois. Mais à chaque fois que l’on pensait toucher au but, un élément extérieur venait enrayer l’engrenage et tout faire capoter.
Une année de galère
Face à ces échecs à répétition, il a fallu réduire la voilure pour survivre le plus longtemps possible en espérant trouver un positionnement enfin porteur. Nous avons dit au revoir à la moitié de l’équipe pour limiter les charges, non sans blessures. J’ai quand même décidé de continuer le voyage. Non plus pour devenir le nouveau Mark Zuckerberg ou accoucher d’une licorne française. Mais simplement pour vivre de mon activité. Garder cette liberté qui m’était chère, et que m’offrait le statut d’entrepreneur. Ces années de galère m’avaient vacciné du rêve de la startup. Je n’y croyais plus et je n’en voulais plus.
Partir pour prendre du recul
Un client inattendu
Et c’est à ce moment-là, alors qu’il ne restait que quelques mois de trésorerie à l’entreprise que des investissements passés ont fini par payer. Nous avions démarché des développeurs de jeux vidéo japonais pour proposer nos services deux ans auparavant lors d’une conférence. Ils semblaient intéressés à l’époque mais n’avaient pas donné signe de vie par la suite. Ils ont mis deux ans à revenir vers nous. La temporalité n’est pas la même au pays du soleil levant.
Une étape charnière pour amorcer la transition
Cette étape fut charnière dans ma vie. Ce renouveau d’intérêt de la part de clients japonais m’a conduit à déménager en Asie. Au départ pour prendre la direction de notre nouveau bureau à Tokyo, comme les affaires étaient plus florissantes. Mais très vite, pour bifurquer radicalement dans une tout autre direction. Avec ma compagne, le plan était simple : passer quelques mois au Vietnam, pays d’origine de sa famille, avant de s’installer à Tokyo. Cependant, nous nous sentions si bien au Vietnam que nous avons revu le plan et nous nous sommes installés pour de bon à Ho Chi Minh Ville.
La vie au Vietnam
Vivre au Vietnam, en décalage horaire avec les équipes du bureau, travailler seul, évoluer dans un environnement différent de celui auquel j’étais habitué à Paris, fréquenté des personnes aux intérêts et aux modes de vie distincts des miens : tout cela m’a permis de prendre du recul sur mon mode de vie et mon travail. Les graines ont été plantées au fur et à mesure des années, mais c’est ce changement d’atmosphère et de rythme qui m’a donné la possibilité de comprendre concrètement que je voulais autre chose. Restait à définir quoi.
La recherche de sens
Un nouveau projet entrepreneurial
Mon associé partageait mon sentiment sur notre métier : nous avions tous les deux envie d’autres choses et de donner plus de sens à notre activité professionnelle. Nos désirs d’engagement ne manquaient pas, nous voulions y répondre par ce que nous savions et avions l’habitude de faire : monter un projet entrepreneurial. Nous avons étudié plusieurs projets pendant des mois : de la ferme hydroponique au food truck en circuit court en passant par le média de bonnes nouvelles ou encore le réseau social sans dark patterns. Mais à chaque fois, nous butions sur le même problème : le besoin de rentabilité financière d’un tel projet venait gangréner les aspirations écologiques et sociales.
Prise de conscience de l’urgence climatique
Au cours de cette même période, je me suis formé sur l’urgence climatique en regardant de nombreuses conférences, en écoutant des podcasts, en lisant des rapports scientifiques, et en rejoignant des associations en tant que bénévole. Cela m’a permis de prendre conscience de la nature systémique des enjeux sociaux et écologiques. L’idée de monter une entreprise permettant de résoudre ces enjeux, du moins une partie, m’apparaissait alors de moins en moins évidente.
Abandon de l’entrepreneuriat
C’est ainsi que j’ai abandonné l’idée de l’entrepreneuriat – type startup - afin de me consacrer à des activités de sensibilisation et de pédagogie sur les enjeux écologiques. Il me semblait essentiel de partager ce que j’avais appris, et d’expliquer en quoi nous devions revoir intrinsèquement le fonctionnement de notre société pour se donner une chance de relever ces enjeux.
Trouver sa place
Activités pédagogiques liées à la transition écologique
À cette époque, j’habitais toujours au Vietnam. C’est là-bas que j’ai démarré mes activités pédagogiques : au sein d’une ferme en permaculture, auprès d’établissements scolaires, et pour des entreprises diverses. J’ai eu la chance de rencontrer de nombreux acteurs engagés. Notamment autour des thèmes de l’agriculture et de l’alimentation. Toutefois, je ne m’y sentais plus à ma place. D’abord pour des questions individuelles. J’aspirais à un autre mode de vie, plus proche de la nature et moins carboné. Ensuite pour des raisons d’engagement : en tant qu’étranger, il m’était difficile d’avoir une réelle influence sur les décisions prises au sein des organisations privées et publiques. Je ne maîtrisais pas les codes, je n’avais pas les accès. Et puis, je me sentais comme un colon venu expliquer aux locaux ce qu’il fallait faire ou ne pas faire. S’en était fini du Vietnam, je voulais rentrer en France.
Retour en France et quête de sens
La décision prise, la question de quoi faire en rentrant se posait. Pour moi, et pour mon épouse. En essayant de convaincre de l’urgence d’agir face aux multiples drames écologiques et sociaux auprès de mes amis et fréquentations, je me suis heurté à de nombreux murs. Je n’employais pas la bonne méthode. Il fallait tenter autre chose. C’est alors que m’est venue l’idée de reprendre à mon compte ce qui m’avait doucement mais sûrement aiguillé vers une transition professionnelle au fil des ans : le récit inspirant du parcours de personnes engagées qui me ressemblent. Ainsi est né le podcast Ozé.
Changement de vie
Stabilité financière
Suite à la fin de mon aventure entrepreneuriale, et à la volatilisation du flux régulier de revenus que celle-ci fournissait, mon épouse avait assuré les rentrées d’argent du foyer au Vietnam. Il fallait trouver une solution pour le retour en France. L’idée de retourner vivre chez les parents de l’un ou l’autre alors que nous étions tout juste mariés et habitués à notre indépendance ne nous attirait guère. J’avais vécu l’expérience à 28 ans en revenant de Berlin pour monter mon entreprise en France. Récidiver à 34 ans, en couple, était notre dernière option.
Recherche d’un lieu de vie
Avant le départ au Vietnam, j’avais eu la bonne idée de mettre en pause mes droits au chômage. Mon épouse n’avait pas eu cette possibilité. En faisant les calculs, cela nous assurait un peu plus de 2 000€ par mois pour vivre. Nous avons opté pour cette option le temps de retrouver une nouvelle activité professionnelle plus rémunératrice. Cependant, cette option venait avec un certain nombre de contraintes implicites. En premier lieu desquelles, l’endroit où nous voulions vivre. Avec ce niveau de revenus, retourner à Paris n’était envisageable : trop cher. Et puis de toute manière, nous ne souhaitions pas particulièrement nous y installer à nouveau. Ma femme étant toulousaine, nous avons mis le cap sur le sud-ouest en quête d’un lieu de vie. Après une rapide expérience en wwoofing dans la campagne montalbanaise, nous avons atterri à Albi. Ce fut le coup de cœur ! Nous avons directement décidé de poser nos valises dans cette magnifique ville qui cochait toutes les cases que nous avions définies : taille moyenne, distance raisonnable en train d’une grande ville, beauté architecturale, vie associative dynamique, proximité avec la nature.
Trouver sa place à Albi
La vie albigeoise m’a permis d’adopter le mode de vie individuel qui me manquait au Vietnam : déplacements à vélo et en train, tri des déchets et compostage, achats en vrac et en direct chez les producteurs, etc. Au niveau professionnel, j’ai pu multiplier les interviews sur le podcast et m’intéresser en profondeur à de nombreux sujets écologiques en faisant intervenir des experts lors de conférences. J’ai rejoint des associations et collectifs locaux engagés. Je me suis essayé à l’enseignement dans le supérieur. J’ai fait un peu de conseil pour des entreprises de l’économie sociale et solidaire. Je me sentais finalement à ma place.
Le voyage continue
Enseigner en lien avec la transition & les enjeux actuels
Après deux années à Albi et avec l’accueil d’un troisième membre dans la famille, le voyage continue. J’ai eu l’opportunité de rejoindre Kelvin, l’une des entreprises que je conseillais et qui propose des cours en ligne autour du fait-maison, tout en continuant le podcast et en développant une activité d’enseignant en école de commerce et à l’université. Ces différentes expériences renforcent l’idée que je suis aujourd’hui à ma place en faisant de la sensibilisation et de la pédagogie sous diverses formes.
Pour ceux souhaitant s’engager face à l’urgence écologique
Cette pédagogie a dernièrement pris la forme d’un livre publié aux éditions Payot : Le courage de renoncer. Ce livre s'intéresse aux parcours des alumni de grandes écoles qui ont décidé de bifurquer pour s'engager face à l'urgence sociale et écologique. J'y traite des aspirations à l'engagement, des freins rencontrés, des moyens de les dépasser collectivement, et du rôle de ces "élites" pour opérer une transformation radicale de notre modèle de société. Cet essai est le fruit de mes interviews sur le podcast Ozé, de mon expérience personnelle et de multiples recherches en sciences humaines.
Voyage vers un monde en transition
Soyons nombreux à entamer ou prolonger le voyage vers un monde en transformation. Les défis à relever sont immenses et nous avons besoin d’œuvrer collectivement à la construction d’un nouveau modèle de société. Il ne manque que le courage d’oser.
ozé
podcast de l'ENGAGEMENT
Ozé est le podcast de l’engagement pour un monde durable, le changement de vie
Dans Ozé, je reçois des professionnels engagés qui racontent leur parcours, partagent leurs connaissances, et expliquent les enjeux de l’urgence sociale et écologique que nous vivons. Ils nous donnent de pistes pour nous engager à notre tour, et participer à la construction d’un monde durable.
À travers ce podcast, mon ambition est de sensibiliser les citoyens, et en particulier les diplômés du supérieur occupant des postes à responsabilité dans la société civile et en entreprise, à l’urgence d’agir dès maintenant pour changer de paradigme de société.
Je souhaite aussi participer à faire rêver les gens à un autre monde, en interrogeant l’univers des possibles, et notamment la racine des règles et normes que l’on considère comme allant de soi. Je veux questionner les valeurs de notre société et en proposer de nouvelles qui soient respectueuses de l’humain et du vivant de manière générale.
Pour aller plus loin, n'hésitez pas à lire le premier livre de Jean-Philippe Decka : "Le Courage de renoncer - Le difficile chemin des élites pour bifurquer vers un monde durable."
Jean Philippe Decka
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